Sans surprise, Donald Trump a été acquitté samedi après-midi par les Sénateurs, juges et jurés dans ce procès en destitution pour «incitation à l’insurrection» ayant mené à l’assaut meurtrier du Capitole, le 6 janvier. Avec 57 votes le reconnaissant «coupable» et 43 «non coupable», les démocrates n’ont pas obtenu la majorité qualifiée des deux tiers (67) requise pour sa condamnation. Si l’accusation n’a pas convaincu suffisamment d’élus républicains, sept d’entre eux ont toutefois rompu les rangs avec le Grand Old Party, et voté en faveur de la culpabilité de Trump. Jamais un procès en destitution d’un président américain n’avait trouvé issue aussi bipartisane. Andrew Johnson en 1868, Bill Clinton en 1999, et Donald Trump, déjà, en 2020: ils se sont tous soldés par des acquittements, mais avec des résultats épousant plus strictement les lignes partisanes.
«Il a violé son serment»
Au terme d’un procès expéditif (cinq jours, quand son précédent procès l’an dernier, dans le cadre de l’affaire ukrainienne, avait duré trois semaines), mais historique : Donald Trump est le premier président de l’histoire des Etats-Unis à avoir été deux fois mis en accusation («impeached»), et le premier à avoir été jugé après son départ de la Maison Blanche. Pour l’accusation démocrate, l’ex-président est le responsable principal des événements du 6 janvier, lorsqu’une foule de ses partisans en colère avait envahi le Capitole au moment où le Congrès américain s’apprêtait à certifier la victoire de son rival démocrate Joe Biden à l’élection du 3 novembre. Cinq personnes, dont un policier, sont mortes dans ces violences.
«Il est désormais évident que Trump a soutenu les actes de la foule hargneuse et il doit donc être condamné. C’est aussi simple que cela», avait lancé Jamie Raskin, le chef des procureurs démocrates, pendant leur dernier réquisitoire prononcé samedi devant le Sénat. Les démocrates voulaient voir Donald Trump reconnu coupable d’«incitation à l’insurrection», puis qu’il soit ensuite rendu inéligible à de futurs mandats fédéraux. «Au moment où nous avions le plus besoin d’un président qui nous protège et nous défende, Trump nous a à la place délibérément trahis. Il a violé son serment», a enfoncé l’un des neuf procureurs démocrates, David Cicilline. Mêlant vidéos choc des violences et extraits des diatribes présidentielles, les démocrates avaient cherché cette semaine à démontrer que Trump avait «attisé la hargne» de ses partisans pendant des mois avec un «grand mensonge», en se présentant comme la victime d’une élection «volée» suite à des «fraudes» dont il n’a jamais apporté la preuve.
«Moralement responsable»
Ce verdict était attendu. L’emprise de l’ancien président sur le parti républicain reste très forte, malgré sa défaite en novembre et la perte de la majorité du parti au Sénat. Trump semble protégé par son hypothétique candidature à la présidentielle de 2024, et sa popularité toujours forte auprès de l’électorat conservateur. Les sénateurs républicains qui ont voté pour son acquittement se réfugient pour la plupart derrière des arguties juridiques défendues cette semaine par les avocats de Trump, pour ne pas avoir à s’exprimer sur le fond ni avoir l’air de cautionner les violences du Capitole. Le procès en destitution serait contraire à la Constitution, puisque Trump est redevenu un simple citoyen. Et le Sénat, pas compétent pour juger un ex-président.
C’est l’argument retenu par le chef des sénateurs républicains, Mitch McConnell. L’influent élu, longtemps plus puissant allié de Trump au Congrès, avait annoncé dès samedi matin son intention de voter pour l’acquittement de l’ex-président, sonnant le glas des espoirs démocrates. Après le vote, samedi après-midi, le sénateur n’a cependant pas mâché ses mots. Dans un discours cinglant, il a accusé Trump d’être «dans les faits et moralement, responsable d’avoir provoqué les événements» du 6 janvier. Les émeutiers ont mis à sac le temple législatif américain, «car l’homme le plus puissant de la planète les avait nourris de mensonges», en refusant sa défaite à la présidentielle de novembre, a-t-il asséné.
Donald Trump a immédiatement réagi à son acquittement, saluant dans un communiqué la fin d’une «chasse aux sorcières». Suggérant sa volonté de continuer à jouer un rôle politique, le milliardaire républicain a promis de continuer à défendre «la grandeur de l’Amérique». «Notre mouvement historique et patriotique» ne «fait que commencer», écrit-il. Avant d’assurer: «Il n’y a rien que nous ne puissions accomplir ensemble».