Enfin du concret pour la vaccination en Afrique. Après les Seychelles et l’Égypte, le Maroc va démarrer sa campagne de vaccination la semaine prochaine alors que le continent africain est devenu la deuxième région où la progression de la pandémie est la plus rapide. Depuis vendredi 22 janvier et l’atterrissage de l’avion de la Royal Air Maroc en provenance d’Inde chargé du premier lot du vaccin britannique « AstraZeneca », c’est le soulagement pour bon nombre de Marocains, qui avaient jusque-là les yeux rivés vers le ciel. Depuis dimanche 24 janvier, il est même déjà possible de prendre rendez-vous pour se faire vacciner contre le nouveau coronavirus, première étape d’une campagne nationale gratuite et « graduelle » prévue dès la semaine prochaine.
Le Maroc passe aux actes
Le vaccin AstraZeneca/Oxford, commercialisé sous le nom Covidshield, est autorisé pour une durée de 12 mois et sera administré en deux temps, avec un intervalle « de quatre et 12 semaines » entre les deux doses, précise le document du ministère de la Santé. Les premières injections sont réservées en priorité aux professionnels de la santé de plus de 40 ans, aux autorités publiques, aux militaires, aux enseignants de plus de 45 ans, mais aussi aux plus de 75 ans, dans les zones marquées par d’importants taux de contamination. Si aucune date n’a été officiellement communiquée pour les premières vaccinations, une campagne de sensibilisation sur le thème « Je me protège, je protège mon pays » avait été lancée dès vendredi par le ministère de la Santé qui espère immuniser quelque 25 millions d’adultes soir 80 % de la population. « Le combat qu’on devrait mener aujourd’hui est celui de la vaccination. Le vaccin est disponible pour que vous puissiez vivre sereinement », explique le spot officiel diffusé en différents dialectes, sur les télévisions, radios nationales et réseaux sociaux.
Le royaume attend mercredi d’autres lots du groupe chinois SinoPharm, selon un communiqué du ministère de la Santé. Ceci s’explique par le fait que le Maroc avait participé aux essais cliniques chinois et avait passé ses commandes dès l’automne. Rabat avait indiqué fin décembre avoir commandé 65 millions de doses de ces vaccins, les moins chers et plus faciles à conserver à des températures de 2 à 8 degrés. Des choix jugés plus en phase avec les réalités marocaines et plus largement africaines.
Car la pandémie ne faiblit pas au Maroc, où près de 2 000 nouveaux cas sont en moyenne recensés chaque jour. Le royaume de 35 millions d’habitants, où l’état d’urgence sanitaire a été déclaré mi-mars, a enregistré plus de 465 000 cas de contamination, dont 8 100 décès, selon le dernier bilan officiel. Un couvre-feu nocturne est en vigueur depuis le 21 décembre et pour trois semaines, les rassemblements sont interdits et les restaurants, cafés, commerces et grandes surfaces ferment à partir de 20 heures. Les restaurants de Casablanca, Marrakech, Agadir et Tanger sont totalement fermés pour la période. En effet, la pandémie touche avant tout les villes à forte densité urbaine, comme la capitale économique Casablanca (Ouest) et la ville populaire de Salé, accolée à Rabat. Comme dans d’autres pays, la campagne, qui avait officiellement été annoncée dès le début du mois de novembre, a été retardée par les délais de livraison du vaccin. Les médias locaux ont toutefois critiqué un manque de communication sur le sujet.
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L’Égypte se lance aussi
L’Égypte a lancé dimanche sa campagne de vaccination contre le nouveau coronavirus en administrant deux doses du vaccin du groupe chinois Sinopharm à un médecin et un infirmier dans un hôpital d’Ismaïlia, dans l’est du pays. « L’Égypte est le premier pays d’Afrique (continentale) à avoir reçu le vaccin et (?) commencé une campagne de vaccination », a dit la ministre de la Santé, Hala Zayed, lors d’une conférence de presse à l’hôpital Abou-Khalifa d’Ismaïlia, l’un des premiers à avoir accueilli des malades du coronavirus dans le pays. En réalité, c’est le deuxième pays en Afrique à lancer une vaccination à grande échelle après les Seychelles.
L’Égypte, pays le plus peuplé du monde arabe avec quelque 100 millions d’habitants, a reçu ses premiers lots de vaccins Sinopharm en décembre. « Toutes les équipes médicales recevront le vaccin gratuitement, c’est leur droit », a ajouté Mme Zayed après avoir rendu hommage aux quelque 330 médecins morts du Covid-19. Après le personnel de santé, la priorité sera la vaccination des personnes atteintes de maladies chroniques puis (des) personnes âgées », avait indiqué samedi le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi. Toutefois, la ministre, qui a elle-même participé aux tests cliniques en 2020, a précisé dimanche que « ceux qui ont les moyens financiers paieront » pour obtenir le vaccin. L’Égypte a signé des contrats avec « trois entreprises anglaise, chinoise et russe », s’assurant 100 millions de doses dont une partie attend d’être livrée, a-t-elle affirmé. Aspirant à devenir le premier fournisseur du continent, Le Caire « signera dans les semaines à venir des contrats pour la fabrication » locale de vaccins avec des entreprises internationales, a-t-elle ajouté. Jeudi, l’Organisation mondiale de la santé avait averti que le continent africain risquait d’être « laissé de côté » dans la course au vaccin avec les pays riches.
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Les Seychelles, champion de la vaccination en Afrique
L’archipel des Seychelles a été le premier pays africain à avoir commencé à vacciner toute sa population, avec le vaccin chinois. Onze jours après son lancement, le 10 janvier, par le président Wavel Ramkalawan, 13 163 doses ont été administrées. « Les Seychelles à partir du 16 (janvier, NDLR) sont classées cinquième, mais, quand vous regardez où nous en sommes, nous avons vacciné plus de 13 000 personnes qui ont reçu leur première dose, nous sommes donc classés troisième en termes de pourcentage de population vaccinée », a déclaré Jude Gedeon commissaire à la Santé publique, lors d’une conférence de presse. Mais le pays ne compte que 98 000 habitants. L’archipel de l’océan Indien, où le tourisme compte pour 65 % du produit intérieur brut, est même devenu le premier pays à poser la vaccination comme une condition d’accès à son territoire pour les visiteurs internationaux.
Sur le reste du continent, notamment en Afrique subsaharienne, seule la Guinée a concrètement commencé à vacciner, mais à titre expérimental. Le pays a reçu 55 doses du vaccin russe, Spoutnik V. À ce jour, 45 personnes ont été vaccinées, surtout parmi les membres du gouvernement. Les populations devraient attendre encore un peu, alors que la Guinée est partie prenante de l’initiative Covax.