À moins que l’affaire ne soit à nouveau renvoyée, l’audience de la Chambre correctionnelle de Dakar sera témoin d’un procès de haute facture, le 20 janvier prochain. Ce dossier qui oppose l’émigré Mouhamed Bèye à Cheikh Tidiane Bâ et Baye Kouta, a été appelé, hier, mais il a été finalement renvoyé. Mouhamed Bèye reproche aux derniers nommés, les chefs d’association de malfaiteurs, d’escroquerie, de charlatanisme et d’abus de confiance.
Les sieurs Cheikh Tidiane Bâ et Baye Kouta sont dans un sale pétrin. Prévenus d’association de malfaiteurs, d’escroquerie, de charlatanisme et d’abus de confiance, portant sur la somme de 311.000.000 FCfa, ils ont été appelés, hier, à la barre de la chambre correctionnelle de Dakar. Mais, l’affaire a finalement été renvoyée jusqu’au 20 janvier prochain, compte tenu de l’absence des conseils des prévenus. En effet, il ressort de la procédure verbale d’enquête que le 13 octobre 2020, le sieur Mouhamed Bèye, émigré sénégalais établi aux USA, avait saisi la Section de Recherches de la Gendarmerie, d’une plainte formulée contre Cheikh Tidiane Bâ et Baye Kouta.
Dans sa plainte, il a expliqué que vers la fin du mois de mai de l’année 2019, il a contacté un guérisseur répondant au nom de Cheikh Tidiane Bâ dont il a vu l’annonce sur internet, pour lui soumettre les soucis de santé de sa mère. Ainsi, selon lui, le sieur Bâ a commencé à prodiguer des soins à la maman jusqu’au jour où il l’a appelé au téléphone, pour lui prédire un avenir radieux, subordonné à des prières, tout en lui recommandant un marabout nommé Pape Samba Badji Barry, capable de faire le nécessaire. Convaincu par la proposition, il est entré en contact avec le soi-disant marabout établi au village de Porokhane Sérère, où il lui a versé une somme de 20.000.000 FCfa pour des gris-gris et des bains mystiques avant de rentrer aux Etats-Unis et de revenir au Sénégal sur ordre de ce marabout, qui le mettra plus tard en rapport avec un certain Arfang Goudiaby, qui n’est autre que Baye Kouta.
Le transport effectué chez Baye Kouta a permis la découverte de billets de banque falsifiés pour une somme de 240.000 FCfa, quatorze (14) cornets de chanvre indien et des pièces d’identité dont une avec sa photo.
Selon le plaignant, Baye Kouta l’a mis sous son emprise par l’usage de forces mystiques, cause pour laquelle, l’obéissant à la lettre, il lui a versé une somme totale de 311.000.000 FCfa. En soutien de sa plainte, il a versé au dossier des reçus de retraits de sommes d’argent effectués dans son compte ouvert à la BHS. Ainsi saisis, les gendarmes enquêteurs ont effectué un transport au domicile de Cheikh Tidiane Bâ, qui a affirmé avoir mis le plaignant en rapport avec Baye Kouta alias Goudiaby, de qui il aurait reçu une somme de 106.000.000 FCfa, qu’il a aussitôt remise aux enquêteurs.
Le transport effectué chez Baye Kouta a permis son interpellation et la découverte de billets de banque falsifiés pour une somme de 240.000 FCfa, quatorze (14) cornets de chanvre indien, le passeport de Mouhamed Bèye et son billet d’avion et des pièces d’identités dont une avec sa photo. En confirmation de sa plainte, Mouhamed Bèye a déclaré sur procès-verbal d’enquête, que lorsqu’il s’est rendu chez Pape Samba Badji, il l’a trouvé drapé totalement dans une tunique qui ne laissait entrevoir que ses yeux à travers deux orbites taillées à hauteur de son visage.
Cheikh Tidiane Bâ a soutenu à l’enquête que Baye Kouta, pour le remercier de l’avoir mis en rapport avec le plaignant, lui a offert une somme totale de 106.500.000 FCfa, représentant sa part sur les fonds versés par Mouhamed Bèye
Interrogé à l’enquête, Cheikh Tidiane Bâ a soutenu avoir rapproché le plaignant de Baye Kouta, sur demande du premier nommé qui sollicitait des prières en vue de devenir milliardaire. Il a également affirmé que pour le remercier, Baye Kouta lui a offert une somme totale de 106.500.000 FCfa, représentant sa part sur les fonds versés par Mouhamed Bèye. Mais d’après lui, il a gardé l’argent chez lui, car il n’avait pas eu le courage de le dépenser.
Pour sa part, Baye Kouta a confirmé avoir connu le plaignant par l’intermédiaire de Cheikh Tidiane Bâ, en soulignant que ce dernier lui a indiqué avoir soutiré beaucoup d’argent à celui-ci et lui demandait de prendre le relais en se faisant passer pour un marabout nommé Badji. Il a, par ailleurs, minimisé les sommes d’argent encaissées, pour soutenir n’avoir reçu qu’une somme de 56.000.000 FCfa qu’il a investie dans l’achat de véhicules, en vue de la location et l’acquisition d’autres biens dont un terrain à 20.000.000 FCfa, tout en précisant n’avoir versé à Cheikh Tidiane Bâ que la somme de 23.000.000 FCfa.
Entendu à l’instruction, Mouhamed Bèye a maintenu les termes de sa déposition, en soulignant que Baye Kouta qui s’est également présenté sous le nom d’Arfang Goudiaby et Pape Samba Badji, lui ont prodigué plusieurs bains mystiques et des gris-gris mais aussi, il lui ont fait assister à des pratiques mystiques extraordinaires, en faisant par exemple couler du sang à partir d’un œuf cassé et d’autres scènes qui ont fini par le convaincren au point de l’amener à leur verser tous ses fonds.
Inculpé pour association de malfaiteurs, escroquerie, charlatanisme, détention de chanvre indien en vue du trafic, détention de signes monétaires contrefaits, blanchiment de capitaux, faux et usage de faux, Baye Kouta a contesté les faits. Puis interrogé au fond et confronté à la partie civile et à Cheikh Tidiane Bâ, il a indiqué ne s’être jamais fait appeler Goudiaby, contrairement aux propos de Bâ qui était au courant de toutes ses transactions avec Bèye puisqu’à chaque fois que celui-ci venait chez lui, il était en compagnie de son disciple Cheikh Ahmet Tidiane.
Se prononçant sur la découverte faite chez lui, il a soutenu qu’il s’agissait d’une petite quantité de drogue en vrac qu’il utilisait pour soigner son asthme, de faux billets de banque accolés à un tableau pour servir de décoration ainsi qu’une pièce d’identité au nom de Ibrahima Cissé mais supportant sa photo, laquelle lui aurait été délivrée par erreur à la Direction de l’automatisation du fichier (DAF).
L’affaire sera, à nouveau, évoquée le 20 janvier prochain, à la Chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Dakar.