En vue pour sa première saison dans l’élite, le jeune milieu international sénégalais Lamine Camara respire la fraîcheur. Son enfance, son adaptation au FC Metz, l’équipe du Sénégal et son modèle Idrissa Gueye… Entretien.
Enfant, quelle place avait le football dans ta vie ?
Depuis toujours, le football représente tout pour moi. Mon père m’a raconté que lorsque j’étais tout petit, c’est avec un ballon aux pieds que j’ai commencé à marcher. Plus jeune, je séchais les cours pour jouer au foot. Mon père me forçait à aller à l’école et moi, je faisais semblant, je faisais comme si j’allais à l’école mais après, j’allais jouer au foot dans les quartiers ou je jouais à la PlayStation.
Que s’est-il passé quand ton père l’a découvert ?
Lui, il ne s’intéressait pas beaucoup au foot. Il ne savait pas que je savais jouer au foot. Il entendait juste des rumeurs : « Ton fils, il est fort au foot. Ton fils, il est comme ça ». Mais lui, ça ne l’intéressait pas. Du coup, un jour, c’est moi qui ai pris mes responsabilités. Je l’ai appelé et je lui ai dit que je voulais jouer au foot, que l’école, ça ne marchait pas. Je ne voulais pas trop attendre. Il m’a répondu : « Oui, je sais mais on n’a pas les moyens donc tu es obligé de te concentrer sur les études. » Mais j’ai été têtu et je ne l’ai pas écouté. Aujourd’hui, il ne regrette pas !
« Je ne m’attendais pas à être titulaire aussi vite »
Parlons maintenant du FC Metz, où tu es arrivé fin mars. Là où beaucoup de joueurs qui viennent d’un autre continent ont besoin d’un temps d’adaptation, toi, quelques jours plus tard, tu étais déjà titulaire contre Bordeaux puis Saint-Étienne. Comment as-tu fait ?
(Rires). En venant ici, je savais que le club avait besoin de moi et qu’il fallait que je sois prêt. Je me suis préparé pour ça à Génération Foot et je me suis mis en tête qu’il fallait que j’aide mes nouveaux coéquipiers tout de suite. J’ai tout fait pour convaincre le coach (László Bölöni) et même si je me disais qu’il allait peut-être me faire confiance, je ne m’attendais pas à être titulaire aussi vite.
Ton deuxième match de Ligue 2 BKT, à Geoffroy-Guichard, s’est terminé par une expulsion. Ça ne t’a pas mis un coup derrière la tête pour la fin de saison ?
C’est vrai que même au Sénégal, je prenais des cartons. Après, ce carton rouge m’a fait du bien parce qu’il m’a fait réfléchir. Je sais que j’ai fait certaines choses qui n’ont pas de sens et que je me retarde moi-même. Je m’énerve trop vite sur le terrain. Je suis parfois nerveux car je n’aime pas perdre. Quand je perds un duel, ça m’énerve ! Mais j’en ai parlé avec des coéquipiers plus âgés, mes parents aussi m’ont aidé, mes grands frères… Tout le monde me reprochait de m’énerver vite sur le terrain, c’était ça mon défaut. Mais j’ai beaucoup travaillé là-dessus et j’ai progressé, j’ai changé.
Et en dehors des terrains, ça a dû sacrément te faciliter la tâche d’arriver dans un club où il y a d’autres Sénégalais dans l’effectif…
Oui, ça m’a beaucoup aidé. En arrivant ici avec Malick Mbaye et Papa Amadou Diallo, on savait qu’il y avait beaucoup de joueurs qui venaient de Génération Foot, comme nous, dont certains qui sont à Metz depuis trois ou quatre saisons. On savait qu’ils allaient beaucoup nous aider et ça a été le cas. Ousmane Ba, Abou Lô, Cheick Sabaly… Je ne peux pas tous les citer mais ils nous ont très bien accueillis et ils nous ont tout de suite montré les choses à faire ou ne pas faire. Ils nous ont aussi montré la ville, des cathédrales, des trucs comme ça…
« Je m’inspire beaucoup d’Idrissa Gueye »
Pour maintenant parler de la saison en cours, tu fais partie des quelques joueurs qui ont disputé tous les matchs de Ligue 1 Uber Eats. Est-ce que tu t’attendais à jouer autant ?
Vu la fin de saison dernière, oui. Je me suis préparé pour avoir le maximum de temps de jeu. Je savais que ça n’allait pas être pareil qu’en Ligue 2 et que c’était un niveau au-dessus. Au début, c’était difficile mais je me suis adapté.
Tu as travaillé sur quoi en priorité ?
Sur la nervosité dont je parlais plus tôt et sur plein de petites choses. J’ai reçu beaucoup de conseils et j’en demande beaucoup aux cadres comme Habib Maïga, Ismaël Traoré… Ils m’aident à me renseigner sur le championnat.
Pour ceux qui ne t’ont jamais vu jouer, comment décrirais-tu ton style ?
Je dirais que je suis un milieu box to box, que j’aime aider mes coéquipiers sur les efforts… Et si je peux pourquoi pas aller marquer… J’ai trois modèles : Kevin De Bruyne, Toni Kroos mais, mon plus grand modèle, c’est Idrissa Gueye. Depuis tout petit, je m’inspire beaucoup de lui. Et maintenant que je suis avec lui en sélection, je regarde ce qu’il fait, lors des entraînements, en dehors…
Peut-être que ta meilleure carte de visite, c’est ce fameux but que tu as mis contre Monaco… Tu peux nous le raconter ?
C’est vrai que ça m’a fait beaucoup de bien car ça faisait un moment que je n’avais pas marqué. Avant ce match contre Monaco, j’avais un peu revu leurs matchs et je voyais que leur portier sortait de ses cages car son équipe domine les matchs, elle a souvent la possession. Et lui est à l’aise et sort beaucoup de ses cages. Je me suis donc dit : « Si j’ai l’occasion, pourquoi ne pas en profiter ? » Et l’occasion s’est présentée ! C’est la première fois que je marquais un but comme ça en match.
« La sélection ? C’est vrai que c’est venu vite »
Depuis la rentrée, tu es appelé par le sélectionneur du Sénégal Aliou Cissé à chaque rassemblement. La première fois, c’était en septembre alors que tu n’avais que 3 matchs de Ligue 1 Uber Eats au compteur. Ça t’a surpris ?
Je ne dirais pas que c’était une surprise car ça fait un moment que je travaille pour ça, que c’est mon objectif. Après le CHAN et la CAN U20 en début d’année, l’objectif, c’était d’intégrer l’équipe A. C’est vrai que c’est venu vite mais il faut être prêt à tout moment. Le coach m’a appelé et j’ai répondu présent.
Lors de la dernière trêve internationale, tu as fêté tes deux premières sélections…
Quand j’ai vu mon nom dans le 11 de départ, ça a été une grande émotion. J’étais tout seul puis les Idrissa Gueye, Sadio Mané et Kalidou Koulibaly sont venus me « réconforter », me dire que ce n’était que du football, que je devais juste jouer mon jeu, en étant libre, sans stress. Depuis tout petit, je regarde les matchs de la sélection à la TV, je vois les Sadio Mané, les Gana Gueye… Et aujourd’hui, je me retrouve en face d’eux, dans le même vestiaire… Franchement, ça me fait beaucoup de bien d’être auprès d’eux. Je profite de leur expérience, j’apprends beaucoup et j’espère que ça me servira à l’avenir.
Tu disais plus tôt qu’Idrissa Gueye était ton modèle. Ça a dû être quelque chose de marquer ton premier but en sélection sur une de ses passes…
Oui… L’équipe a de bons cadres, qui mettent les jeunes en confiance. Idrissa nous facilite beaucoup la tâche. Il n’attend pas qu’on aille vers lui, c’est lui qui vient vers les « gosses ». Il nous donne beaucoup de conseils. Et lors de ce match, on menait 2-0 et Idrissa est venu vers moi pour me dire : « C’est l’occasion pour toi d’en profiter Si tu veux marquer, tu vas marquer. Juste, libère-toi et joue au foot. On va t’aider ». Et après ça, il m’a fait la passe et j’ai marqué !
« Sadio Mané, c’est une légende du foot »
Sadio Mané, Habib Diallo ou Ismaïla Sarr… Et tu as parlé du FC Metz avec les ex-joueurs du club aujourd’hui en équipe du Sénégal ?
C’est eux qui me demandent parfois : « Comment tu te sens là-bas ? Est-ce que tu es bien installé ? », ce type d’informations… Ils veulent juste m’aider, me mettre dans les meilleures conditions. C’est vrai qu’une fois que tu es à Génération Foot, forcément, tu entends parler du FC Metz. Là-bas, c’est ça notre objectif, faire de bonnes performances et aller en Europe, à Metz, car c’est là-bas notre destination.
Comme Sadio Mané, tu es Sénégalais. Comme Sadio Mané, tu es passé par Génération Foot. Comme Sadio Mané, tu débutes ta carrière en Europe au FC Metz. Et maintenant, c’est quoi la suite pour toi ?
J’espère bien que je ferai mieux que lui, j’espère bien (rires). Mais Sadio Mané, c’est une légende du foot. Je m’inspire beaucoup de lui : son style de vie, comment il gère sa carrière… C’est à moi de profiter d’être avec Sadio Mané et les autres cadres de la sélection pour – inch’Allah – faire pareil.
Pour terminer, ce serait quoi une CAN réussie pour le Sénégal ?
Faire de bonnes performances et pourquoi pas un sans-faute ! On va aller là-bas la tête haute parce qu’on est les champions d’Afrique, il faut qu’on montre ça, qu’on aille là-bas comme les champions d’Afrique, pour conserver notre titre et j’espère qu’on va y parvenir…