Après les nominations Seydina Oumar Touré et de Guy Marius Sagna comme agents de la municipalité de la ville de Dakar, le Président Macky Sall a proféré des menaces à l’endroit des maires ne respectant pas le Code des collectivités territoriales. Beaucoup pensent que ces propos du chef de l’État visent le maire de Dakar. Macky Sall estime que « les collectivités territoriales sont des démembrements de l’Etat ». « On ne saurait laisser les maires faire ce que bon leur semble », estime-t-il. Seneweb est allé consulter le constitutionnaliste Mawa Ndiaye pour trancher ce débat.
Il est vrai que les collectivités territoriales sont des « démembrements de l’Etat ». Et l’autonomie et la libre administration ne veulent pas dire indépendance de ces entités. Toutefois, il ne faut pas oublier que la décentralisation est une option de la République du Sénégal. Et en son l’article 102, la Constitution stipule qu’« elles s’administrent par des assemblées élues au suffrage universel direct ».
“La libre administration et l’autonomie fondent toutes les actions de la collectivité”
C’est ce qui fait dire au Constitutionnaliste Mawa Ndiaye, « qu’il y a deux choses qui doivent retenir l’attention lorsqu’on étudie le droit constitutionnel local : la libre administration et l’autonomie ». Pour lui “la libre administration et l’autonomie fondent toutes les actions de la collectivité”. “Tant que l’action, en soi, se borne des limites de loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013 portant Code général des collectivités territoriales. Ces 332 articles renferment l’ensemble des droits et obligations de maires et des mairies. Tout ce que la loi offre peut être pris dans son entièreté. Et au terme de l’article 106 alinéa 12 du Code général des collectivités territoriales, le maire est chargé de nommer aux emplois communaux”. En poursuivant, M. Ndiaye précise que l’on pourrait se poser une question légitime. « On parle de commune et pas de ville ». Mais, poursuit-il, à lire l’art. 167 al.4, « la ville a le statut de commune ». Clair.
Donc, la seule possibilité que le Président de la République puisse révoquer un maire, c’est quand la responsabilité de ce dernier est engagée pour les fautes mentionnées à l’article 140 du même Code. Et dans ces fautes on ne parle nullement de défaut de nomination. Et “on n’incrimine pas là où la loi n’incrimine pas” renchérit l’enseignant.
“La Constitution qui donne au maire le droit de s’administrer librement est supérieure à un acte administratif”
Maintenant, il en serait autrement si les personnes recrutées sont sous le coup d’une peine prononcée par le juge leur interdisant d’occuper des postes dans des structures publiques. La loi le prévoit pour les pilleurs de deniers dont la peine est prononcée.
In fine, M. Ndiaye rappelle que « la révocation est un acte administratif, en elle-même tenue par le principe de la légalité ». En clair, la Constitution qui donne au maire le droit de s’administrer librement est supérieure à un acte administratif.
Il est aussi important de rappeler, également le principe de l’article 102 de la constitution qui stipule que les collectivités « participent à la territorialisation des politiques publiques, à la mise en œuvre de la politique générale de l’Etat ainsi qu’à l’élaboration et au suivi des programmes de développement spécifiques à leurs territoires ». Ce qui par ailleurs démontre que ces mêmes collectivités doivent entretenir des rapports assez fluides avec l’Etat. D’où l’importance d’une pacification des rapports entre Etat et collectivités.