Malgré son isolement croissant, Trump persiste

Saint Louis, MO, USA - March 11, 2016: Donald Trump supporter holds sign outside the Peabody Opera House in Downtown Saint Louis

A l’heure où les Etats-Unis battent battent de tristes records de décès dus au Covid, le président sortant a livré une diatribe sur Facebook mardi soir, répétant ses accusations d’«élections truquées»

Les tribunaux l’ont désavoué dans près de 40 recours en justice depuis l’élection, deux de ses plus fidèles alliés ne sont, pour la première fois, pas allés publiquement dans son sens, mais rien n’y fait: Donald Trump a beau être de plus en plus isolé, il persiste. Dans une vidéo filmée depuis la Maison Blanche et publiée mercredi sur Facebook, le président américain a réitéré ses accusations d’«élections truquées», affirmant détenir des «preuves accablantes» de tricheries et autres «fraudes massives». Trump, qui n’a toujours pas reconnu sa défaite face au démocrate Joe Biden, plus de quatre semaines après le scrutin, assure que la victoire lui a été volée dans une poignée d’Etats-clés.

Au cours d’une diatribe parfois confuse et longue de 46 minutes, Trump a enfilé les théories du complot les plus fantaisistes, toutes démontées ces dernières semaines. Et alors que cinq des six Etats dans lesquels l’équipe de Trump s’acharne devant les tribunaux (Arizona, Géorgie, Michigan, Pennsylvanie et Wisconsin) ont certifié, avec sceau des gouverneurs, les résultats de leurs élections, fermant la porte à toute contestation d’ici le vote du Collège électoral, le 14 décembre.

«Forces corrompues»

Tandis que la pandémie de Covid-19 bat de nouveaux records aux Etats-Unis, qui viennent de dépasser pour la première fois la barre des 100 000 patients hospitalisés (près de deux fois le pic de la vague du printemps), et a compté ce mercredi plus de 2760 nouveaux décès en 24 heures, le président américain choisit de consacrer ce qu’il juge être «sans doute le discours le plus important» de sa carrière politique à des accusations parfaitement infondées, pour lesquelles ses avocats ne sont jamais parvenus à apporter la moindre preuve.

Mardi, même William Barr, son très loyal ministre de la Justice, avait rejeté les allégations de son patron. «À ce stade, nous n’avons pas vu de fraude à une échelle susceptible de changer le résultat de l’élection», a déclaré le procureur général à l’Associated Press. Autre allié jusqu’ici indéfectible, le chef de file des sénateurs républicains, Mitch McConnell, avait lui fait référence à la relance économique qui sera menée en janvier par «la nouvelle administration», reconnaissant implicitement, pour la première fois, la défaite de Trump. La semaine dernière, son administration avait finalement été autorisée à coopérer avec l’équipe de transition de Joe Biden.

Flanqué de drapeaux américains et debout derrière un pupitre, sans public et face caméra, Donald Trump a néanmoins maintenu que des «forces corrompues» avaient rempli les urnes de bulletins frauduleux. Il a fait appel à la Cour Suprême, lui demandant de faire «ce qui est juste pour notre pays» – qui consisterait, selon lui, à annuler des centaines de milliers de votes pour qu’il l’emporte «facilement dans tous les Etats». «Cette élection a été truquée, tout le monde le sait», a-t-il encore répété. Au cours de l’élection du 3 novembre, qui a connu une participation historique, Joe Biden a recueilli plus de 81 millions de voix, un record. Donald Trump a, lui, franchi le cap des 74 millions de voix, également inédit. En pourcentage, le résultat est beaucoup moins spectaculaire: Trump a recueilli moins de 47% des suffrages exprimés.

Trump, candidat en 2024?

Alors qu’il semble chaque jour un peu plus seul dans sa croisade pour contester la victoire de Biden, Donald Trump évoque désormais ouvertement la possibilité d’être de nouveau candidat à la présidence en 2024. «Ce furent quatre années fantastiques. Nous essayons de faire quatre ans de plus. Sinon, je vous reverrai dans quatre ans», a-t-il déclaré mardi soir, dans un discours lors d’une fête de Noël à la Maison Blanche, fermée à la presse mais dont une vidéo a circulé sur internet.

En théorie, rien ne l’empêche de se présenter en 2024. La Constitution américaine interdit d’assumer plus de deux mandats, mais permet d’en faire deux non consécutifs (ce n’est arrivé qu’une seule fois dans l’histoire américaine: Grover Cleveland, élu président en 1884, avait été battu quatre ans plus tard, mais réélu en 1892). Selon NBC, Donald Trump aurait même évoqué avec des proches une énième provocation: il envisagerait d’annoncer le lancement de cette campagne pour 2024 le 20 janvier… au moment de l’investiture de Joe Biden.

Menaces

Infondées ou contredites, les accusations portées par le président américain, amplifiées par ses avocats et dans les emails et SMS reçus par dizaines chaque jour par ses soutiens, n’en sont pas pour autant sans conséquence. Mardi, le responsable de la supervision des élections en Géorgie, Gabriel Sterling, a appelé le président à dénoncer publiquement les intimidations dont sont victimes de nombreux officiels ces dernières semaines. «C’est allé trop loin», a insisté Sterling, lui-même républicain. «On dirait bien que vous avez perdu dans l’Etat de Géorgie, a-t-il rappelé, à l’adresse de Trump. Vous avez le droit d’aller devant les tribunaux, mais […] il faut que vous vous exprimiez: arrêter d’inspirer les gens à commettre de potentiels actes de violence». Sinon, a-t-il mis en garde, expliquant qu’un policier était désormais posté devant son domicile, «quelqu’un pourrait être blessé, se faire tirer dessus, être tué».

Le directeur de la sécurité de l’entreprise Dominion, dont les machines électorales sont largement utilisées aux Etats-Unis, et qui se retrouvent depuis quelques jours au cœur d’une énième et fumeuse théorie du complot propagée par les avocats de Trump (et réfutée par des agences fédérales), a même dû se cacher dans un lieu tenu secret, après avoir reçu de nombreuses menaces de mort.

Mercredi, le secrétaire d’Etat de Géorgie, Brad Raffensperger, également républicain, a clairement fait le lien entre les allégations de fraudes électorales martelées par Donald Trump et les menaces reçues par des personnes en charge des élections dans son Etat. Malgré les demandes faites au président «d’essayer d’apaiser la rhétorique violente née de ses déclarations continues de victoire dans des Etats où il a clairement perdu, il a tweeté: “Exposez les fraudes massives en Géorgie”, a regretté l’élu. C’est exactement ce genre de langage qui nourrit cet environnement de menaces croissantes contre des agents électoraux, alors qu’ils font tout simplement leur travail».

La Géorgie fait l’objet de toutes les attentions: des seconds tours d’élections sénatoriales y ont lieu le 5 janvier, qui détermineront la future majorité à la puissante chambre haute du Congrès. Donald Trump a d’ailleurs annoncé qu’il se rendrait dans l’Etat ce samedi, pour un meeting de soutien aux deux sénateurs républicains sortants.

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